Comment une destination se fait hara-kiri

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S’il nous fallait une preuve d’une fin proche du charter, et avec lui, de l’ancien business model du tourisme tunisien, TUI France vient de nous la donner.

 

Nous l’écrivions récemment (“Open Sky : il y a urgence”) :
« Le trafic charter sur la Tunisie a diminué de plus de moitié depuis 2011, estime une étude de la Banque Mondiale. Sur Djerba, destination touristique par excellence, les vols charter ont chuté de près de 40% entre 2010 et 2014, nous renseigne l’OACA ; soit 4539 vols en moins pour une baisse des nuitées de 1,6 millions.
« Le tourisme tunisien en provenance d’Europe, dépendant à plus de 95% du trafic aérien, se trouve ainsi amputé d’une source de clientèle essentielle, sans pouvoir profiter du nouveau réservoir à touristes qu’est le package dynamique ».

Aujourd’hui, des bruits de couloir nous apprennent que le programme aérien charter de Marmara – et donc de TUI France – sur Djerba pour l’été 2016 passera de 150 000 sièges à moins de 30 000. Une rumeur que le PDG de TUI France, Pascal de Izaguirre, vient involontairement de confirmer aujourd’hui dans une interview à notre confrère Tourmag (“TUI France lancera le package dynamique en septembre 2015”). Il y annonce le lancement par TUI France de packages dynamiques dès septembre 2015, et par là-même le début de la fin du charter.

Que dit M. de Izaguirre ? Il dit d’abord que TUI réduira drastiquement le risque sur le charter en vendant « à 100% les chaînes charter affrétées mais aussi les vols des autres compagnies, low-cost ou non, pour permettre un maximum de flexibilité aux clients et alimenter aux mieux nos hôtels. »
Et il ajoute : « Il faut que les TO se bougent un peu, pour sortir du 7 jours en vols affrétés ! (…) Les agents de voyages pourront mixer les vols de 500 compagnies aériennes, avec les hôtels du groupe, mais aussi des établissements que nous aurons sélectionnés ».

Ainsi donc, Djerba pourra en 2016 compter « à 100% » sur les chaînes charter de TUI France dont la capacité est diminuée de plus de 120 000 sièges… que nous devrons combler non pas avec 500 compagnies mais seulement quelques-unes, faute d’Open Sky ! Ces 120 000 clients ne seront cependant pas perdus pour TUI France : elle pourra les envoyer au Marmara Agadir qu’elle vient d’inaugurer cette semaine, et ils auront le choix entre plusieurs compagnies low-cost pour le Maroc…
Un scénario qui ne se limitera pas à la France mais englobera tous les marchés émetteurs, y compris l’Allemagne où les packages dynamiques ont déjà fait leur entrée chez les grands TO.

A une question sur le coût du non-open Sky pour le tourisme tunisien, le Directeur Général de l’ONTT nous répondait récemment que ce coût était « exorbitant ». Sans risque de se tromper, on peut aujourd’hui évaluer ce coût à la fermeture d’une bonne partie de notre parc hôtelier.
Merci nos stratèges, merci nos ministres.

LM