Tunisair va mieux… et s’éloigne du tourisme

Pour 2014, Tunisair améliorerait ses indicateurs. Cependant elle s’éloigne inexorablement du trafic charter qui ne représenterait plus que 14% de son activité, contre 37% en 2006. Il s’agit là d’un véritable changement de business model.

 

Lors d’une conférence de presse tenue ce matin au siège de Tunisair (photo), sa PDG, Mme Salwa Sghaier, a pu afficher un optimisme mesuré. En effet, malgré la perte en 2014 de 189 000 passagers due aux turbulences des marchés libyen et russe, Tunisair augmente ses revenus de quelque 3% à 1 118 millions de dinars. Une hausse permise, notamment, par une compression des charges de 3% et l’augmentation de sa recette unitaire par passager de 6%.

La décision récente d’affecter en 2014 la prise en charge par l’Etat des dettes de Tunisair vis-à-vis de l’OACA (165 millions de dinars) permettra à la compagnie nationale d’afficher un résultat équilibré pour l’exercice 2014, contre une perte de 205 millions en 2013.

Concernant l’avancement de son plan de redressement, la compagnie a confirmé que, par rapport aux 1 700 départs volontaires prévus par le plan, 900 demandes volontaires ont été formulées dont 700 éligibles à ce départ.

La compagnie confirme par ailleurs le maintien de son plan de flotte. En particulier, la réception des deux A330 est prévue pour respectivement mai et juin prochain. La compagnie n’annonce pas pour autant le lancement d’une ligne sur Montréal. Celle-ci « n’interviendrait pas avant l’été 2016 », précise Tunisair.

« La vocation de Tunisair est le régulier »

En réponse à notre question sur l’activité charter de Tunisair, Mme Salwa Sghaier a précisé que « la vocation de Tunisair est le trafic régulier ». On est, en effet, loin du temps où la compagnie nationale se targuait de son modèle hybride entre le régulier et le charter qui a si bien réussi au tourisme tunisien. Aujourd’hui, la recherche – légitime – de rentabilité pousse Tunisair à abandonner le trafic charter. Celui-ci ne représente plus en 2014 que 14% du trafic global de la compagnie, alors qu’il représentait 37% du chiffre d’affaires en 2006 (voir graphique ci-dessous).

Et c’est selon ce même critère de rentabilité que Tunisair menace de supprimer la ligne Paris-Tozeur dès le 28 mars, si le ministère du Tourisme ne s’engage pas à prendre en charge le déficit de cette ligne.

Tunisair-evolution-trafic-Charter




Open Sky : il y a urgence

Sans mise en place du Ciel Ouvert, la diminution inexorable des vols charter mettrait le tourisme tunisien en péril. On ne met pas la charrue avant les bœufs, et la charrue du tourisme, même réformée et remise à neuf, n’avancera pas sans une solution au problème du transport aérien.

 

Le trafic charter sur la Tunisie a diminué de plus de moitié depuis 2011, estime une étude de la Banque Mondiale. Sur Djerba, destination touristique par excellence, les vols charter ont chuté de près de 40% entre 2010 et 2014, nous renseigne l’OACA ; soit 4539 vols en moins pour une baisse des nuitées de 1,6 millions.
Le tourisme tunisien en provenance d’Europe, dépendant à plus de 95% du trafic aérien, se trouve ainsi amputé d’une source de clientèle essentielle, sans pouvoir profiter du nouveau réservoir à touristes qu’est le “package dynamique”. Le développement de celui-ci est boosté par les compagnies aériennes low-cost. Des compagnies qui attendent un accord sur l’Open Sky en Tunisie depuis 2008, date du début des négociations de notre gouvernement avec l’Union européenne.

Ces négociations sont maintenant suspendues « par crainte pour Tunisair », entend-on. Mais aussi parce que, rétorquent certains, « nos hôtels et agences de voyages ne sont pas prêts » pour une commercialisation sur le Net.
En réalité, seuls Tunisair et les TO ont déjà intégré comme une donnée la “mort programmée du charter”. Le redéploiement de la compagnie nationale sur les vols réguliers est un axe stratégique majeur de ces dernières années. Sur le marché français, par exemple, le trafic charter de Tunisair a chuté de 91% entre 2010 et 2013. Les TO, quant à eux, se sont depuis quelques années convertis à la vente de “packages dynamiques” (40% des ventes de Thomas Cook France par exemple), même si ce n’est que pour vendre leur surplus de lits et de sièges avion.

Les TO se préparent en “sécurisant leurs approvisionnements”

Plus significatif, les grands TO s’activent à “sécuriser les approvisionnements”, tant au niveau des hôtels que des avions. Pour parer à la tentation que pourraient avoir les hôtels, en Tunisie et ailleurs, de succomber à internet et aux “packages dynamiques”, les TO labellisent les meilleurs hôtels sous leurs propres marques et optimisent leurs flottes aériennes. TUI, par exemple, est déjà un mastodonte du transport aérien avec une flotte de 140 avions (soit sept fois Tunisair), dont 77 chez Thomson Airways et 40 chez TUI Fly. Pour les hôtels, ce sont 50 nouveaux hôtels qui seront gérés dans les années à venir sous les différents labels de TUI Hotels, s’ajoutant aux 232 existants.

A la lecture de ces faits et chiffres, qui ne peuvent que s’accentuer encore dans l’avenir, les décideurs du tourisme tunisien préfèrent regarder ailleurs et égrener les mauvaises raisons qui justifieraient de reporter l’Open Sky. Deux de ces raisons méritent qu’on s’y arrête un peu :

  • L’ouverture du ciel équivaudrait, selon ses détracteurs, au sacrifice de centaines de salariés chez Tunisair.

Il est permis de douter de la sincérité de cet argument quand on sait que les effectifs de Tunisair ont été arbitrairement augmentés en 2011 de quelque 1 000 salariés, et que la non application du plan de structuration de la compagnie nationale, selon ses propres estimations, lui coûterait 100 millions de dinars par an (lire notre article). De plus, peut-on sérieusement mettre en péril les millions d’emplois du secteur du tourisme – qui en a perdu au moins 30 000 depuis 2011 – pour une excuse aussi peu recevable ? Enfin, pourquoi n’évoque-t-on jamais les 24 000 emplois créés au Maroc par la simple instauration du Ciel Ouvert ?

  • Le deuxième argument des anti-Ciel Ouvert est que la clientèle des compagnies low-cost, en quête de prix bas, ne serait pas intéressante pour le tourisme tunisien et pour les hôtels.

Rien n’est moins vrai. D’abord, les low-cost créent une demande nouvelle (dite “d’induction”) d’une clientèle recherchant le bas prix aérien mais aussi la flexibilité. L’explosion du marché des longs week-ends (très peu développé chez nous) est due d’abord à la tendance au fractionnement des vacances chez des consommateurs auxquels les low-cost offrent la flexibilité nécessaire.
Par ailleurs, une compagnie low-cost n’est pas, dans les faits, toujours synonyme de bas prix. Il arrive même, en cas de forte demande et de faible concurrence, que le billet d’une low-cost soit plus cher que celui d’une compagnie traditionnelle. La clientèle d’affaires et haut de gamme est, elle aussi, sollicitée par les low-cost, à l’instar d’EasyJet avec son programme EasyJet Plus. Ainsi, au moment même où Tunisair adopte le “piece concept”, EasyJet Plus s’apprête à permettre à ses clients (à partir du 19 mars) d’avoir deux bagages en cabine.

A suivre…

LM




EasyJet à Monastir

EasyJet annonce la programmation d’un Londres-Monastir dès le mois de juin prochain (lire l’article de Tourmag), démontrant ainsi son intérêt pour la Tunisie. Ce vol, annoncé à 38,99 euros, se fait dans le cadre d’accords bilatéraux entre la Tunisie et l’Angleterre, comme c’est déjà le cas pour d’autres compagnies low cost comme l’anglais Jet2 ou le français Transavia.

En attendant les accords sur l’Open Sky avec l’Union européenne qui permettront aux compagnies low cost de servir les aéroports tunisiens depuis n’importe lequel des aéroports européens choisis par elles, le vol d’EasyJet sur Monastir montre que ces compagnies sont dans de bonnes dispositions vis-à-vis de la destination.




Tendances : baisses alarmantes sur la France et l’Allemagne

En France “l’effet Charlie”, en Allemagne le retour en grâce de l’Egypte et de la Grèce expliquent la baisse des entrées sur ces deux marchés.

 

Au 10 février, les entrées de touristes français et allemands sont en recul respectivement de 9,1% et 5,9% par rapport à la même période de 2014. Une baisse qui s’est principalement accélérée sur les dix premiers jours de février : –11% pour les Français et –28 ,4% pour les Allemands (voir tableau 1).
En France, notre destination semble subir “l’effet Charlie” comme la plupart des destinations “musulmanes”. Il s’avère donc urgent pour nos professionnels et pour le ministère du Tourisme de dissiper le malaise naissant chez nos clients français ; à l’instar du Maroc qui vient de débloquer 9,2 millions d’euros à cet effet.

Pour le marché allemand, l’explication est moins évidente. Tout allait bien pour la Tunisie jusqu’au mois d’octobre puisque, selon les chiffres officiels allemands de la saison écoulée (octobre 2013 à octobre 2014, voir tableau 2 pour les destinations concurrentes), nous réalisions sur le marché du court et moyen courrier par avion une croissance de 16%, contre une croissance moyenne du marché de 5,4% (à 19, 94 millions de touristes). Le décrochage de notre destination semble entamé à partir du mois de novembre, ce que confirment les statistiques de l’ONTT : les entrées allemandes accusaient en novembre un recul de 13%, après une progression de 4% en octobre.
Ce décrochage est confirmé par les chiffres de ventes. La Tunisie a subi, depuis l’ouverture en novembre des réservations d’hiver, les conséquences du retour en grâce de ses anciens concurrents. Selon une étude de la centrale de réservation allemande Traveltainment, alors que l’aéroport d’Enfidha enregistrait en décembre une baisse de 20% des arrivées allemandes, l’Espagne et surtout la Grèce enregistraient au même moment une forte croissance (+ 31% pour Rhodes, +25% pour Heraklion). Les réservations sur Hurghada, en Egypte, ont enregistré une hausse de 35% au mois de décembre après avoir crû de 22% au mois de novembre.

Par ailleurs, les réservations d’été semblent suivre cette même tendance à la baisse pour la Tunisie. De surcroît, un trop-plein de capacité hôtelière turque a été mis sur le marché allemand du fait de la chute du marché russe, ce qui risque de compliquer encore plus la tâche de nos opérateurs par une concurrence tarifaire encore plus ardue.

Nous nous sommes consolés ces dernières années de la baisse du marché français par le semblant de retour du marché allemand. Mais ces chiffres et ces faits tendent à confirmer qu’en Allemagne, nous n’avons pas encore quitté le statut de “destination de substitution”.

LM

Tableau 1 : entrées des non-résidents du 1er janvier au 10 février 2015
TABLEAU-ENTREES-DES-NON-RESIDENTS-PAR-NATIONALITE-01-2015

Tableau 2 : Principales destinations des Allemands en court et moyen courrier par avion, octobre 2013 à octobre 2014
Principales-destinations-des-Allemands

 




Qatar : histoire d’une pub

« Autant de pub pour une si petite destination ? ces Qataris se donnent vraiment les moyens … », pourrait se dire le voyageur à Paris, à voir les murs des aéroports tapissés d’affiches publicitaires montrant les joueurs du PSG vantant les mérites du Qatar comme destination touristique. En fait, l’histoire de cette campagne est moins reluisante qu’elle n’en a l’air ; elle est relatée dans un livre français récent, « Une France sous influence, quand le Qatar fait de notre pays son terrain de jeu » que publie Vanessa Ratignier avec Pierre Péan aux éditions Fayard. On y apprend que cette campagne a moins été dictée par les besoins de communication du tourisme du Qatar que par l’instauration d’une nouvelle directive de l’instance européenne de football concernant la gestion des clubs…
Extraits :

« En vertu de la règle du fair-play financier, les clubs ne doivent pas dépenser plus d’argent qu’ils n’en génèrent », précise l’UEFA, en janvier 2011, alors que l’organisation commence tout juste à contrôler les finances des clubs engagés dans des compétitions européennes. A défaut, ceux-ci prennent le risque d’être exclus des compétitions européennes.
Un risque à éviter à tout prix. Certes, à ce jeu-là, le PSG dispose de solides atouts : son propriétaire, ses gazo-dollars, ses nombreuses passerelles pour injecter de l’argent frais dans le club parisien, gourmand de stars du ballon rond. A l’issue de la saison 2011-2012, le PSG risquait cependant d’afficher un déficit considérable, résultant notamment des sommes dépensées pour l’achat et les salaires de joueurs, montants que ne compensaient pas, loin de là, les recettes du club. Des pertes que la mise en place du fair-play financier interdit de répéter sous peine de sanctions. Aussi, pour continuer à mener grand train tout en évitant le blâme, QSI (Qatar Sports Investments, ndlr), propriétaire du PSG, s’est tourné vers QTA, la Qatar Tourism Authority. Tous deux ont signé un contrat d’image. Son enjeu : promouvoir le Qatar comme destination touristique. Son montant : 125 millions d ‘euros pour la saison 2011-2012, montant qui devrait atteindre les 200 millions d’ici la saison 2015-2016. Grâce à ce contrat surprise, le PSG réduit son déficit pour la saison 2011-2012 à 5,45 millions d’euros ! Sauf que le prix versé par QTA n’a pas de contrepartie, le contrat ayant été signé fin 2012. Pourtant, la prestation non effectuée a bel et bien été rémunérée. Le contrat, d’un montant de 600 millions sur quatre ans, s’applique en effet dès l’exercice écoulé. Phénomène inédit ! Et une aubaine pour le PSG qui efface ainsi la quasi-totalité de ses pertes tout en respectant, ne serait-ce qu’en apparence, les exigences du fair-play financier instauré par l’UEFA.

 




Selma Elloumi Rekik installée au ministère du Tourisme

La cérémonie de passation entre Mme Karboul et celle qui lui succède au ministère du Tourisme, Mme Elloumi Rekik, s’est effectuée cet après-midi au siège du ministère. De cette cérémonie, on retiendra l’émotion de la ministre sortante, et l’air déterminé de la nouvelle ministre.

En effet, cette dernière a insisté, lors de sa courte intervention, sur la nécessité de « réformer les structures », de continuer les réformes entamées par l’équipe sortante mais aussi de définir de nouvelles priorités qui, a-t-elle insisté, ne sauront être fixées « avant la consultation des professionnels ».

Un vœu de dialogue qu’elle a tenu à confirmer auprès de Radhouane Ben Salah, président de la FTH, en lui proposant de « se voir rapidement ». Ce dernier n’a pas manqué de se montrer optimiste quant au bon déroulement de la collaboration avec la nouvelle ministre.

Photo, de g. à droite : Selma Elloumi Rekik, Amel Karboul et Wahida Djaït, DG de l’ONTT.




N’oublions pas Chokri

C’est en ce même jour de l’année 2013 que fut assassiné le Martyr Chokri Belaïd, sans que les instigateurs de ce crime soient connus à ce jour.

La question qui se pose aujourd’hui est de savoir si le nouveau gouvernement et son ministre de l’Intérieur béni par Ennahda pourraient tenir la promesse électorale de Nidaa Tounes de faire aboutir ce dossier, en désignant et condamnant tous les participants à ce qui fut un véritable attentat contre le pays et contre la démocratie.




Marché canadien : en attendant la relance

ENTRETIEN AVEC ISSAM KHEREDDINE ET FARIDA HENNI, O.N.T.T. MONTREAL. Avec 16900 entrées en 2010 et seulement 9700 en 2014, le marché canadien a beaucoup reculé en quatre ans. Un recul qui a profité essentiellement à la Grèce et la Turquie. Malgré un budget en baisse, l’Office du tourisme à Montréal tente d’inverser la tendance sur ce marché plus porteur qu’il n’y paraît, centré sur les longs séjours et la clientèle senior.

 

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Le marché canadien a baissé de 42% par rapport à 2010. Comment l’expliquez-vous ? Comment voyez-vous son évolution durant les années à venir ?

Issam Khereddine, Directeur de l’ONTT Montréal
Depuis un an, le marché est en augmentation [de +0,7%, voir le bilan de l’année 2014] : en 2014, il n’a pas baissé, malgré la conjoncture et le manque de financement. En effet, nous avons moins de budget qu’avant 2007, la publicité conjointe a été abolie. Tout se passe comme si l’administration considérait le marché canadien comme un petit marché. Quant à la baisse par rapport à 2010, elle s’explique par la situation surtout sécuritaire. Ici, les gens y sont très attentifs et le site gouvernemental était très sévère concernant la Tunisie.

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Farida Henni, chargée de Relations publiques
Récemment encore, des restrictions très sévères ont été émises après ce qui s’est passé dans le Sud. Mais en 2014, nous avons pu stabiliser le marché et arrêter le saignement en rassurant nos partenaires TO, réseau de ventes, compagnies aériennes ainsi que les médias. Concernant l’importance du marché canadien, qui faisait 17 000 entrées en 2010, il faut souligner qu’il représentait 170 000 nuitées car ces vacanciers partent en hiver pour au minimum deux semaines. Certains restent six mois : jusqu’en 2010, des gens achetaient des appartements en Tunisie pour y séjourner, et les mettaient en location l’été. Il s’agit essentiellement de baby-boomers, de retraités, une clientèle qui adore la culture et qui dépense. En 2010, les Canadiens ont apporté 21 millions de dinars de recettes. Leurs dépenses sur place représentent en moyenne 2000 dollars par séjour.

 I. Khereddine Même si tout est en stand-by tant que la situation politique n’est pas éclaircie, nous sommes très optimistes pour les années qui viennent. Nos partenaires le sont aussi. Mon expérience sur d’autres marchés m’a montré que l’important était la qualité des actions menées, même si nous sommes pénalisés par le budget. Depuis janvier 2014, nous avons mis en place un plan d’action très agressif. Ainsi, nous sommes à l’écoute du réseau de vente qui est le miroir de la destination et qui véhicule son image. Quand un client se rend dans une agence, c’est l’agent de voyage qui décide à 99% du choix de la destination.

F. Henni Nous avons aménagé dans nos locaux une salle pour donner une formation sur la destination Tunisie, et nous démarchons les écoles et universités pour qu’elles nous envoient leurs futurs diplômés en tourisme. Nous sommes le seul office de tourisme au Canada à le faire. Nous avons aussi instauré un programme pour recueillir par téléphone les appréciations des anciens clients de la Tunisie, grâce à des listes fournies par les TO. Ces derniers n’ont pas lâché la Tunisie, ils ont seulement gelé la destination et continué à participer avec nous à des opérations ; et cette année déjà, certains ont repris.

Quelles sont les destinations concurrentes qui ont profité de la baisse de la Tunisie ?

F. Henni J’avais pensé que ce serait le Maroc, mais à mon étonnement, notre flux touristique a été récupéré par la Turquie et surtout la Grèce. Nos clients habituels ont retrouvé en Grèce l’ambiance et le climat qu’ils aimaient en Tunisie. Et l’ouverture par Turkish Airlines de vols directs sur la Turquie a créé un intérêt chez les Canadiens pour cette nouvelle destination.

Quel a été l’impact de l’ouverture, puis de la suppression du vol direct de Syphax Airlines ? Qu’en est-il du vol direct de Tunisair annoncé, semble-t-il, pour l’automne 2015 ? [voir aerotunisie.com]

I. Khereddine Le vol de Syphax a fait beaucoup plus de tort que de bien, et c’est la destination qui a perdu. Nous avions soutenu cette compagnie, nous l’avons fait participer à toutes nos actions promotionnelles. Mais les choses ne se sont pas passées selon nos espérances. En ce qui concerne Tunisair, nous attendons encore les clarifications. Dernièrement, leur représentant était présent sur notre stand à Toronto, ce qui est un bon signe.

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Montréal en hiver. Les Canadiens voyagent de septembre à mai et privilégient les longs séjours, la culture et les circuits vers le Sud.

Quelles sont les caractéristiques du marché canadien et plus particulièrement québécois ?

I. Khereddine En été, les Canadiens restent chez eux car le climat est très agréable et Montréal offre de nombreuses animations. La période de voyage s’étend de septembre à mai. Les Canadiens ne voyagent pas idiot. En Tunisie, ils apprécient l’usage de la langue française, la culture, l’histoire. Ils font surtout des circuits, notamment au Sud, et pour les périodes de repos privilégient les régions de Hammamet et Sousse-Port El Kantaoui. Ils séjournent essentiellement dans des hôtels de 3 à 5 étoiles, mais certaines catégories se tournent vers les hôtels de charme, le tourisme responsable, les circuits en voiture de location.

Le tourisme médical est très développé, essentiellement vers Cuba, la République Dominicaine et le Costa Rica. Nous avons organisé en janvier 2014 un voyage de presse sur le tourisme médical et la thalassothérapie en Tunisie, et participé à trois salons spécialisés. Nous organisons un autre voyage fin mars sur ce thème, avec la participation d’équipes de télévision. Les gens sont très intéressés de savoir qu’on pratique en Tunisie toutes sortes d’interventions, comme l’implantation d’iris. Et les interventions peuvent coûter quatre à cinq fois moins cher qu’au Canada.

F. Henni En 2010, beaucoup de TO disaient que la Tunisie allait remplacer la Floride auprès des baby-boomers car elle offre plus de diversité et de dépaysement. Et pour le tourisme médical, le système de santé tunisien a ici très bonne réputation et les Canadiens lui font confiance.

I. Khereddine Nous sommes en train d’organiser une grande opération promotionnelle pour début septembre. Il s’agit d’un voyage VIP sur le thème “mode et tourisme” autour d’un défilé du célèbre styliste canadien Yves-Jean Lacasse et d’un spectacle avec une soprano canadienne. Il pourrait se dérouler au musée du Bardo. Nous comptons aussi impliquer les stylistes tunisiens et les écoles de mode, assurer une large couverture médiatique à cet événement. Il y aura au minimum une vingtaine d’artistes invités et nous comptons sur l’effet des réseaux sociaux pour intéresser leurs fans à la destination.

F. Henni Qui dit mode dit artistes, création, innovation, et il n’y a pas mieux qu’un artiste pour parler d’une destination. Nous aurons un magicien et différents artistes qui parlent à des millions de personnes dans leurs shows.

I. Khereddine Nous programmons aussi un voyage pour une cinquantaine d’agents de voyages de l’ACTA, probablement en novembre. Cette opération aurait dû avoir lieu en 2014, sur le vol direct de Syphax Airlines – nous avions déjà effectué un voyage de prospection – mais la compagnie nous a laissés de février à juin sans nous donner de réponse officielle, et elle n’a pas pu être réalisée.

GM




Nouvelle ministre du Tourisme, et après ?

Open Sky, ONTT, AMC : la nouvelle Ministre devra s’atteler aux trois grands dossiers qui constituent les freins structurels au développement du secteur.

 

La nomination d’une membre du parti majoritaire en la personne de Selma Elloumi Rekik au ministère du Tourisme pourrait s’interpréter comme un regain d’intérêt de la part de Nidaa Tounes pour le tourisme, secteur légué un moment à un membre controversé d’un “particule” non identifié. En cela, on peut parler d’une bonne nouvelle, même si cette nomination constitue un reniement de l’engagement électoral de Nidaa Tounes de nommer au Tourisme une personnalité issue du secteur.

L’espoir est de voir cette éminente chef d’entreprise s’entourer de l’équipe qui lui permettra de mettre en application des réformes qui n’ont que trop tardé, et qu’on pourrait résumer ainsi :

  • relance des négociations sur l’Open Sky avec la communauté européenne sur la base d’une libéralisation immédiate du ciel sur Djerba et Enfidha, sans y inclure Tunis qui attendra l’élargissement de sa capacité aéroportuaire ;
  • réforme de l’ONTT, notamment par la création d’une agence de promotion ;
  • clôture du dossier de l’endettement par le vote de la loi sur l’AMC (Assets Management Compagny) en prenant en compte les observations des hôteliers, et notamment celles concernant la constitutionalité de certains aspects du projet antérieur.

Trois dossiers qui constituent les freins structurels au développement du secteur, et trois mesures qui font la quasi-unanimité des décideurs du tourisme. Mme Rekik aura besoin, pour les appliquer, de volonté et de soutien politique plus que d’une nième copie de la “Stratégie 2016”, rebaptisée “Stratégie 2020”, pour devenir “Stratégie 3+1” sous la houlette d’Atout France sans recevoir un début d’application.

LM




Quel ministre pour le Tourisme ?

Le candidat au portefeuille du Tourisme devrait se prévaloir à la fois d’une expérience dans le tourisme et d’une appartenance à un des partis de la future coalition gouvernementale. Ce candidat, aux allures de mouton à cinq pattes, existe bel et bien…

 

« Constituer un nouveau gouvernement, c’est comme faire un puzzle avec les morceaux d’un kaléidoscope. » Cette phrase de Winston Churchill décrit à peine la complexité de la tâche d’un chef de gouvernement en Tunisie, tant les candidats sont nombreux, leurs filiations politiques incertaines et les alliances des partis mouvantes.

Pour le tourisme, on se croyait pourtant sorti d’affaires suite à la promesse du candidat Béji Caïd Essebsi, alors président du parti aujourd’hui majoritaire, de nommer une personne appartenant au secteur. La première mouture du gouvernement nous a montré que cette promesse ne serait tenue qu’accessoirement, et soumise aux jeux et enjeux entre partis politiques. Elle a surtout été ressentie comme la preuve du désintérêt de Nidaa Tounes pour le secteur du tourisme.

Il nous faut donc nous résigner à rechercher un candidat qui puisse se prévaloir à la fois d’une expérience dans le tourisme et d’une appartenance à un des partis de la future coalition gouvernementale. Ce candidat, aux allures de mouton à cinq pattes, existe bel et bien. Qui plus est, il est membre du bureau exécutif de Nidaa Tounes et bénéficie d’une longue expérience du tourisme aussi bien dans l’hôtellerie que dans le secteur des agences de voyages. Il s’agit de Foued Bouslama, qui a la particularité, par rapport à d’autres candidats professionnels, de ne présenter aucun risque de conflit d’intérêt puisqu’il est complètement dégagé de toute fonction dans le tourisme.

Parmi les professionnels, on semble prêt à accepter cette nomination, à défaut de la souhaiter, comme « la moins mauvaise » selon l’expression d’un hôtelier.

Le défaut principal de F. Bouslama serait, aux yeux des professionnels, sa grande discrétion, autrement dit sa « soumission à la discipline du parti ». Mais on peut supposer a contrario qu’un tel « défaut » pourrait lui valoir, s’il est nommé, un soutien aussi discret qu’efficace de la part de son parti pour mener les réformes qui l’attendent.

LM