TCB : “Notre volonté est de relancer le MICE, notamment à l’international”

Entretien au journal Le Temps avec Lotfi Mansour, Directeur Exécutif du GIE Tunisia Convention Bureau, publié le dimanche 12 février 2023.

Le Temps : Vous avez activement contribué à la naissance du Tunisia Convention Bureau en compagnie de nombreux professionnels Tunisiens du MICE. La création de ce Convention Bureau signe-t-elle le grand retour du MICE en Tunisie ?

Lotfi Mansour :Notre volonté et celle de nos partenaires, notamment l’ONTT, est de relancer le MICE, notamment à l’international dans la foulée du retour du marché après le COVID. Cette relance passe par une structure fédératrice qu’est le TCB, lequel ne pouvait exister sans la mobilisation des professionnels du secteur.

La vraie bonne nouvelle, avec la naissance
du TCB, c’est que les professionnels se mettent enfin ensemble pour replacer la
Tunisie sur le marché du MICE, non pas par des discours mais à travers un plan
d’action concret. C’est une première qui mérite d’être soulignée. L’autre bonne
nouvelle est que nos hôtels et agences spécialisées n’ont pas cessé d’investir
malgré la chute du marché MICE ces 10 dernières années. C’est ainsi que la
destination offre de nouvelles belles unités équipées pour le MICE dans
beaucoup de régions, et que nos agences sont capables d’organiser les réunions
en virtuel ou en hybride comme en présentiel.

Pourquoi le choix de René Trabelsi, président d’honneur du TCB ?

D’habitude, ce poste honorifique est créé
pour profiter du prestige ou du réseau d’une personne du domaine. Au TCB, nous
visons également à profiter de l’expertise de René Trabelsi, notamment dans
l’aérien, et de sa présence en Europe. De plus, le TCB sera amené à défendre la
candidature de la Tunisie pour l’accueil de grands évènements ou congrès et M.
Trabelsi a démontré qu’il sait être un bon avocat pour son pays. Vous comprenez
que, pour nous, la question qui se posait était de savoir s’il accepterait ou
non de nous sacrifier un peu de son temps, et il a accepté sans hésitation.  

Quel est l’objectif de l’organisation de Tunisia MICE Day ?

Les professionnels tunisiens vivent au
rythme des salons et workshops internationaux qui restent la meilleure occasion
de rencontrer en nombre et en direct des acheteurs étrangers. Le Tunisia MICE Day
ambitionne de devenir ce type de rendez-vous annuel où les acheteurs (ainsi que
les journalistes) étrangers viennent en Tunisie pour juger sur place de l’offre
du pays, via un programme de visites de 2 jours, et pour rencontrer leurs
homologues tunisiens. Le Tunisia MICE Day est aussi un colloque où seront présentés
les résultats d’une enquête annuelle que nous réaliserons ; et il est enfin
une soirée de gala où seront décernés les prix Challenge MICE pour les
meilleurs opérateurs du secteur. C’est donc un important vecteur de promotion
du MICE en Tunisie.

Où se positionne la Tunisie aujourd’hui pour l’accueil des congrès et d’événements ? Est-ce une destination d’affaires ?

Elle est loin d’exploiter tout son
potentiel, d’autant plus que les crises du tourisme en général et la faiblesse
de notre budget de promotion ont entrainé une concentration des efforts sur les
produits grand public. Il ne faut pas se leurrer : la Tunisie est plus une
destination d’incentives que de congrès. Tunis ne figure pas et ne figurera pas
de sitôt dans le Top 25 de l’ICCA (International Congress and Convention
Association) dans lequel Dubaï, par exemple, malgré ses atouts et ses
investissements, ne figure qu’au 21e rang mondial (classement 2022).
D’ailleurs, le TCB compte bien devenir membre de l’ICCA qui est une sorte de
club mondial des organisateurs de congrès. 

L’offre hôtelière est-elle suffisante quantitativement et qualitativement pour attirer de grands événements internationaux ?

Sur les 10 dernières années, le
fléchissement de l’activité MICE est intervenu dans un contexte d’augmentation
de la capacité d’accueil et de réunions dans de nombreuses régions et notamment
Tunis, avec souvent des enseignes internationales (Mövenpick, Hilton,
Mariott, Anantara etc.) et donc des standards de service internationaux. Non,
s’il y a manque, il est peut-être du côté des centres de congrès dans certaines
régions. Cependant, l’offre s’évalue aussi en termes de sites naturels ou
historiques que nous avons et que nous n’exploitons pas suffisamment :
l’amphithéâtre de Carthage ou celui d’El Jem, le fort de Hammamet ou même la
Table de Jugurtha sont de magnifiques sites d’événements dont la capacité
d’accueil se chiffre en milliers de personnes. A Tunis, la capacité actuelle
pour les congrès, en dehors des salles des hôtels, reste sous-exploitée ;
c’est le cas de la Cité de la Culture avec son théâtre de 1 800 places et ses
divers autres salles et espaces d’exposition. A défaut d’un Convention Center
en bonne est due forme, Tunis dispose quand même d’une salle modulable de 5000
m2 au Parc du Kram, d’une salle de 1500 places au centre de l’UTICA,
et bien d’autres.

L’infrastructure, le manque de personnel compétent et l’environnement handicapent souvent la tenue de grands congrès en Tunisie…

Je remarque que vous êtes focalisé sur
« les grands congrès »  pour lesquels
la concurrence se joue souvent entre les grandes capitales d’affaires telles
que Barcelone, Berlin, Vienne ou Paris. La Tunisie joue dans une autre
catégorie mais ne manque pas de cartes à jouer, notamment pour les incentives
et les réunions de taille moyenne. Pour le secteur de la santé par exemple (premier
pourvoyeur de congrès en Europe, 20% du volume total), la Tunisie ne manque pas
de professeurs et de médecins de renommée pour plaider sa cause. Quant à l’environnement
dans certaines agglomérations, c’est certainement un handicap auquel il faut
remédier.

On parle peu du MICE en Tunisie. Y a-t-il une stratégie pour restructurer cette niche au ministère du Tourisme ?

Le TCB est une tentative de structuration
du secteur dans une perspective de synergie entre l’Administration et les
professionnels. L’idée d’une commission mixte ONTT/TCB pour promouvoir le
secteur a été bien accueillie tant par le Ministère que par l’ONTT. Le Tunisia
MICE Day, par exemple, sera un test de la qualité de cette coopération
public/privé.