La religion, ça se partage !

A Djerba, des musulmans participent au pèlerinage juif de la Ghriba. Loin d’être marginaux, les lieux de culte partagés sont très répandus en Méditerranée, de la Turquie à l’Egypte, de l’Algérie à la Palestine en passant par la Tunisie…

 

A Djerba, des musulmans participent chaque année au pèlerinage juif de la Ghriba. La synagogue du Kef a été aussi un lieu de culte partagé par les juifs et les musulmans. Loin d’être des cas marginaux, ces histoires reflètent un phénomène très répandu autour de la Méditerranée, de la Turquie à l’Egypte et de l’Algérie à la Palestine en passant par la Tunisie.

“Lieux saints partagés” est le titre d’une passionnante exposition* sur ce sujet. Présentée en 2015 au musée MuCEM de Marseille, elle est actuellement visible au musée du Bardo dans une nouvelle version, complétée par des pièces de grande valeur historique provenant des musées tunisiens. Dans ses deux versions, l’exposition évoque bien sûr des cas de partage impossible, comme dans les Territoires occupés par Israël. Mais on y découvre à quel point il s’agit d’une anomalie, contraire à des pratiques bien ancrées. Non seulement les religions du Livre partagent les mêmes récits et les mêmes prophètes, mais bien souvent leurs fidèles se côtoient dans les mêmes sanctuaires.

Marie, une vénération partagée

La figure de Marie-Mariem, vénérée par les chrétiens comme par les musulmans, est une des principales passerelles entre religions. A Oran, par exemple. L’église de Santa Cruz, dédiée à la Vierge Marie, a été édifiée au 19e siècle pour célébrer la fin d’une terrible épidémie de choléra. Sa fête annuelle connaissait une participation massive de toute la population de la ville, catholiques et musulmans confondus. De nos jours, des pieds-noirs originaires d’Oran ont créé un nouveau sanctuaire à Nîmes, dans le Sud de la France, pour perpétuer ce pèlerinage ; et des musulmans originaires d’Oran y participent également.

Et à Oran même, bien que la porte de la chapelle de la Vierge soit désormais fermée, des musulmans continuent à s’y rendre pour contempler la statue de Marie par une petite lucarne… Les autorités coloniales, qui avaient cru à l’époque utiliser la vénération des musulmans pour Marie-Mariem pour faciliter les conversions, en sont restés pour leurs frais : les Algériens fréquentaient effectivement les lieux qui lui étaient dédiés, sans pour autant changer de religion.

De même, à Jérusalem, l’église du Sépulcre de la Vierge était fréquentée par les musulmans depuis le Moyen Age ; on y trouve même un mihrab. Au Sinaï, des musulmans viennent prier dans la chapelle du Buisson ardent du monastère Sainte-Catherine.

L’exposition est richement illustrée d’images et de textes sacrés mettant en relief les figures à la fois coraniques et bibliques d’Issa-Jésus, Mariem-Marie, Ibrahim-Abraham, Elyas-Elie…

Le Coran bleu : versets évoquant Issa (Jésus) (11e s., musée de Kairouan)
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Saints et pèlerinages

En Tunisie, la synagogue de la Ghriba à Djerba – l’une des plus anciennes du monde – reçoit de nombreux musulmans lors du pèlerinage annuel commémorant Rebbi Meïr et Rebbi Shemun. On a connu autrefois le cas inverse : le mausolée de Sidi Mehrez, saint musulman du Xe-XIe siècle, était aussi fréquenté par les juifs de Tunis avant leur dispersion. Rien d’étonnant à cela puisque Sidi Mehrez, “saint patron” de la capitale, a la réputation d’avoir accordé sa protection aux juifs et de leur avoir attribué un quartier dans les murs de la ville.

En Turquie et dans les Balkans, c’est le personnage énigmatique d’al-Khidr, mentionné par certaines traditions musulmanes, qui est l’objet d’un culte partagé : la population le confond avec la figure chrétienne de saint Georges. C’est ainsi que le monastère grec-orthodoxe de Saint-Georges près d’Istanbul accueille chaque année un grand rassemblement de cent mille pèlerins, musulmans et chrétiens confondus. Il existe même, en Macédoine, une petite église où se déroulent de curieuses célébrations le jour du 6 mai, fête de saint Georges : les chrétiens viennent y prier le matin, puis la gardienne du sanctuaire décroche les icônes orthodoxes et les musulmans s’y prosternent à leur tour.

Quand la religion rassemble…

Culte partagé rime souvent avec générosité. Louis Massignon, traducteur du Coran, a passé sa vie à étudier l’islam tout en étant un chrétien fervent. Il a fondé en 1954, en Bretagne, un pèlerinage dédié à la paix en Algérie qui se référait aux Sept Dormants, un récit commun aux musulmans (sous le nom de Ahl el-Kahf) et aux chrétiens ; ce mythe présente de surcroît une grande ressemblance avec une vieille légende bretonne. Autour de la Méditerranée, il existe plusieurs lieux sacrés commémorant les Sept Dormants et fréquentés par les adeptes des deux religions.

Plus récemment et dans la même lignée, le père jésuite Paolo Dall’Oglio, passionné par l’islam, avait fondé en Syrie une communauté religieuse mixte, chrétienne et musulmane. Il s’est livré à l’Etat Islamique pour obtenir la libération d’otages musulmans ; il n’en est jamais revenu.

Pourquoi les habitants de Lampedusa manifestent-ils une si forte solidarité avec les réfugiés qui échouent, jour après jour, sur leurs plages ? Sans doute parce que leur île a été de tous temps un refuge pour les naufragés. Or depuis le 16e siècle, les marins chrétiens comme musulmans disposaient des offrandes et des vivres à l’intention des naufragés dans une grotte sacrée, qui était dédiée à la fois à Marie et à un saint musulman. Là encore, il y avait une histoire de religion partagée.…

G.M.

 

* Exposition du MuCEM (Marseille) en partenariat avec le musée du Bardo et l’INP. Jusqu’au 12 février 2017.

Photo du haut : image populaire représentant Marie, Syrie
Sauf mention contraire, les illustrations de cet article proviennent de l’exposition de Marseille ou de celle de Tunis.

 

Pèlerinage juif de la Ghriba à Djerba, également fréquenté par des musulmans
(photo MCM)ghriba


Prêtre orthodoxe et fidèle musulman au monastère Sainte-Catherine au Sinaï

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Sanctuaire musulman de Sidi Mehrez, fréquenté aussi autrefois par les juifs de Tunis

(photo MCM)

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La sourate de Mariem (œuvre contemporaine), statue de la Vierge (19e s.) et statue d’une déesse-mère (musée archéologique de Nabeul)
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Mariem-Marie et l’ange Jibril-Gabriel : récit de l’Annonciation dans le Coran (à gauche) et dans l’Evangile (à droite), icône libanaise du 21e siècle
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Mosquée de Chenini, un des lieux où est commémoré le mythe musulman et chrétien des Sept Dormants/Ahl el-Kahf
(photo MCM)
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L’ascension d’Elie (Elyas) dans un char tiré par des chevaux, bas-relief découvert à Sbeïtla
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Symboles sur des fibules du Sud tunisien

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Symboles sur des lampes chrétiennes antiques
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Les syndicats répondent à Safi Saïd

On attendait une réaction officielle aux propos tenus par Safi Saïd à l’encontre du tourisme lors de son passage à El Hiwar Ettounsi (lire notre article خوذ العلم من روس الفكارن). Cette réplique est venue conjointement de la part de la FTH, la FTAV et l’UGTT dont voici le communiqué :

 

Terrorisme verbal” à l’encontre du secteur touristique

Tunis, le 8 novembre 2016 – Les syndicats ouvriers et patronaux du Tourisme (UGTT, FTH et FTAV) dénoncent les propos irresponsables tenus par l’invité de l’émission diffusée dimanche soir sur la chaîne TV El Hiwar Ettounsi visant le secteur touristique et tous ceux qui en vivent directement ou indirectement.

Eu égard à la gravité des affabulations portées, l’UGTT, la FTH et la FTAV les qualifient de “terrorisme verbal” tant leur intention de nuire au tourisme tunisien est évidente. Elles s’insurgent contre les insultes proférées à l’égard des employés du secteur qui exercent des métiers des plus nobles de service et non de servitude. A ce propos, dénier aux professionnels de la croisière, une branche sinistrée, de se réjouir d’une reprise de leur activité est le signe d’une ignorance totale de l’espoir que représente une telle reprise pour les artisans, les guides, les taxistes, restaurateurs… etc.

Ces mêmes professionnels considèrent n’avoir aucune justification à apporter à leurs détracteurs les plus zélés, sauf que de leur rappeler les entrées en devises que leur secteur procure au pays, les centaines de milliers de postes d’emploi qu’il génère dans toutes les régions, l’effet induit sur les autres secteurs vitaux de l’économie. Les signataires insistent particulièrement sur le non-sens de l’idée de la substitution du tourisme par l’agriculture. Deux secteurs ô combien complémentaires et conjointement nécessaires au développement de l’économie nationale.

Les signataires du présent communiqué fustigent les multiples contradictions dans les déclarations de ce personnage. Ils pointent du doigt la somme d’inepties débitées et qui ne sont que la preuve d’une parfaite méconnaissance des rouages les plus élémentaires du secteur du tourisme.

S’il est vrai que le tourisme tunisien passe par une période difficile et qu’il a besoin de réformes profondes, Patronat et Syndicat sont persuadés que le tourisme tunisien jouera à l’avenir le rôle important qui lui est dévolu pour le bien de l’économie nationale et du pays.

UGTT – FTH – FTAV




Safi Saïd : خوذ العلم من روس الفكارن

A défaut de nous révéler le moyen de sauver le tourisme, Safi Saïd nous révèle son ignorance…

 

« Secteur de servitude, secteur qui pue, secteur fragile qui ne produit rien »… les insultes contre le tourisme pleuvaient dimanche soir dans l’une de nos TV ! Une véritable boule puante lancée de la bouche du bien-nommé Safi Saïd (le « pur et bienheureux »). Ce tribun n’est pas n’importe qui puisqu’il a récolté 0,8% des suffrages lors de la dernière élection présidentielle, et qu’il sera peut-être notre futur président.

Après nous avoir livré sa solution (estampillée KKK) aux maux de notre douane en affirmant que « les nègres occupent 70% des postes de douaniers en France, car le nègre ne pardonne pas », le voilà qui s’attèle au secteur du tourisme ; ça promet.

Le « bienheureux » a procédé à un étalage de ce que l’animateur de l’émission appelle sa « culture profonde ». Selon cet expert autoproclamé, nos recettes par touriste ne dépasseraient pas les 10$. Malheureusement pour lui, elles étaient en 2015 de quelque 600 dinars (400 $) par touriste, et 216 dinars par nuitée (ou s’il préfère 180 $). Cette recette est sans doute faible quand d’autres destinations font le double ou le triple ; mais 400 $, ce n’est pas 10$.

Il nous affirme plus tard que « notre eau va aux touristes au détriment de notre agriculture », désignant à la vindicte publique le touriste qui « se douche trois fois par jour et nage dans la piscine ». Manifestement, notre grand écrivain est aussi ignare de la question de l’eau en Tunisie que de celle du tourisme. En effet, le tourisme ne consomme que 1% de nos ressources en eau contre 80% pour l’agriculture ! Son projet d’éliminer le tourisme au profit de l’agriculture ne l’avancerait à rien sur cette question de l’eau. En revanche, ce grand connaisseur des affaires maghrébines semble ignorer que l’un de nos problèmes dans ce domaine est la “rivière verte” créée par feu Kadhafi qui « aspire, selon un spécialiste, des millions et des millions de mètres cubes d’eau par jour » de la nappe phréatique commune à nos pays, et peut causer son épuisement (lire “l’eau en Tunisie, une crise occultée”).

Le bienheureux se livre ensuite à une étude comparative des plus édifiantes entre notre destination et quelques autres. « Malte, assène-t-il, réalise des recettes touristiques quatre fois celles de la Tunisie ». Malte, qui est une des plus belles destinations méditerranéennes, n’en demandait peut-être pas tant : elle n’atteint en réalité même pas le niveau des recettes touristiques tunisiennes. En 2014, année record pour Malte, sa recette était de 1,1 millions d’euros contre 3,6 milliards de dinars (soit 1,8 millions d’euros) pour la Tunisie la même année.

Le professeur Saïd ne semble pas avoir révisé ses fiches. Ou peut-être les a-t-il confondues, puisque c’est à Malte que se pose un problème d’infrastructure et d’eau dû à la pression touristique. A Malte, toute l’eau potable provient de la désalinisation de l’eau de mer, toute l’énergie est importée et toute l’infrastructure est surdimensionnée par rapport aux besoins de la population locale pour cause de flux touristique…

Inutile de continuer à énumérer les inepties de ce monsieur pour s’apercevoir qu’il est le genre de politicard décrit par Clémenceau : « Il n’a pas d’idées, mais il les défendrait jusqu’à la mort ».

LM

 

خوذ العلم من روس الفكارن : ce n’est pas chez une tortue qu’on cherche le savoir, selon un adage tunisien.




L’Odyssée Zarzis en rénovation

L’hôtel Odyssée Resort Thalasso & Spa Zarzis fermera ses portes du 18 décembre prochain au 15 mars 2017 pour « engager des travaux de maintenance essentiels », selon le communiqué adressé à ses partenaires.

Ainsi, malgré la conjoncture défavorable, ce resort de 344 chambres et suites, comprenant un centre de thalasso réputé, engage un budget important pour maintenir son standing et ses services.




Ces anachronismes qui nous minent

Tunisair, ONTT, FTH sont les noms des boulets d’un secteur qui se meurt de ne pouvoir avancer. La crise du tourisme tunisien est avant tout celle de ses structures réticentes au changement et à l’anticipation…

 

On doit à l’italien Antonio Gramsci une des plus célèbres définitions de la crise : « La crise consiste justement dans le fait que l’ancien meurt et que le nouveau ne peut pas naître ». Il en va ainsi de la crise dans le tourisme tunisien, qui est due pour une bonne part à la survivance de certains anachronismes. Jugez-en.

Aérien

De l’avis de tout les experts et des TO eux-mêmes, le charter comme modèle économique n’a, au mieux, qu’un an ou deux à vivre avant d’expirer complètement, du moins sur le marché européen. Un marché où le nouveau mot d’ordre est le “package dynamique”. Tunisair, dont le succès a été bâti sur un modèle hybride comptant 60% de trafic régulier et 40% de charter, s’est éloigné de ce modèle qui a fait son ADN. Sans pouvoir pour autant concevoir une nouvelle stratégie “sans tourisme” ou “sans charter”, puisqu’elle continue à faire du faux charter avec la vente “en douce” de blocs-sièges.

L’absence totale, cet hiver, de vols charter sur la Tunisie depuis le marché français est un prélude au zéro charter depuis tous les marchés européens. Et la question à laquelle Tunisair et le gouvernement devraient alors répondre est : comment va-t-on transporter les candidats au tourisme en Tunisie, et à quel prix ? On a moins d’un an pour y répondre…

ONTT

L’ONTT, quant à elle, s’évertue à remplir sa mission de « mettre en œuvre la stratégie de l’Etat » au sein d’un ministère dont la mission est aussi de mettre en œuvre « la politique du gouvernement ». Manifestement, on est devant un cas de “millefeuille administratif” – quelque peu justifié jadis par les hésitations sur l’opportunité d’un ministère dédié au Tourisme (suppression du ministère en 1986, fusion avec celui du Commerce en 2001…). Mais ces hésitations ne semblent plus d’actualité depuis des années. L’ONTT, voué à la restructuration-disparition depuis une vingtaine d’années, se pose beaucoup de questions, sauf celle de sa vocation. Si cette vocation est de promouvoir la destination, la seule stratégie viable serait d’allouer tous ses moyens à cette promotion. Garder l’ancien carcan tout en s’échinant à un pseudo redéploiement des moyens, par la fermeture d’une représentation par-ci ou la vente d’un local par-là, ne fait que retarder l’inéluctable restructuration et la rendre plus difficile.

FTH

La FTH vit ces jours-ci l’élection de ses présidents régionaux, laquelle préparera l’élection d’un président national. A priori, un processus des plus démocratiques. Hélas, il ne s’agit que d’une démocratie de façade.

En effet, après avoir repoussé la constitution de l’Union des Métiers du Tourisme, les tenants de la FTH, soucieux de préserver leur pouvoir, ont repoussé sine die les propositions de changement des statuts de leur fédération, et notamment celui limitant à deux le nombre de mandats des présidents régionaux.

Ainsi, les prochaines élections à la fédération de Sousse déboucheront sans surprise sur la réélection du même président depuis près de 30 ans. A la FTH, on croit à la démocratie sans alternance et, s’il le faut, à la démocratie avec présidence à vie. La constitution du pays peut proclamer que « nul ne peut occuper le poste de Président de la République pendant plus de deux mandats complets successifs ou séparés », la FTH n’en a cure ; ses présidents régionaux sont irremplaçables, pour les résultats que nous connaissons…

LM

 




La Côte d’Ivoire relance son tourisme

Quelle approche adopter pour relancer le tourisme après son effondrement ? Une question à laquelle la Côte d’Ivoire semble répondre : « slowly but surely ».

Photo : Roger Kacou, ministre du Tourisme de la Côte d’Ivoire (à g.), en compagnie de  Santiero Jean-Marie Somet, ministre Plénipotentiaire et directeur général de l’Office du tourisme ivoirien

top-resa-3Le stand de la Côte d’Ivoire à l’IFTM-Top Resa

« Je connais bien votre beau pays, j’y ai ouvert deux hôtels Mövenpick… » C’est ainsi que le ministre ivoirien du Tourisme, Roger Kacou, entame notre entrevue avec lui sur le stand de la Côte d’Ivoire à l’IFTM-Top Resa. C’est donc une longue expérience de l’hôtellerie et du tourisme (les chaînes hôtelières Intercontinental et Mövenpick, l’African Travel Association…) qu’apporte M. Kacou au tourisme ivoirien.

Le tourisme de Côte d’Ivoire a amorcé sa reprise ces dernières années, et affiche l’ambition d’atteindre les 2 millions de touristes internationaux, contre 1,5 million actuellement. Pour y parvenir, Roger Kacou insiste sur une démarche par étapes. « Après les turbulences vécues par le pays, il nous fallait une refonte du code du tourisme et de celui des investissements ainsi qu’une réhabilitation des sites touristiques avant de penser à la promotion, que nous entamons actuellement », explique-t-il. Ne pas mettre la charrue avant les bœufs semble le souci des autorités ivoiriennes ; une démarche qui débouche, par exemple, sur la réorganisation des réceptifs, la création de zones foncières touristiques et l’instauration du e-visa.

Du coup, le tourisme est porté par la dynamique générale du pays, qui réalise une croissance économique de 9% par an et devient une vraie destination d’affaires pour les investisseurs africains et internationaux. L’ambition de la Côte d’Ivoire est de faire passer le tourisme, à l’horizon 2020, à 7% du PIB contre seulement 4,8% actuellement.

Pour y parvenir, le pays mise sur un tourisme de niches comme le tourisme culturel, l’agrotourisme (la Côte d’Ivoire est le premier exportateur mondial de cacao et de noix de cajou), le tourisme religieux (basilique de Yamoussoukro) et le tourisme sportif.

Et pour mieux faire connaître la variété de son offre touristique, la Côte d’Ivoire accueille depuis cinq ans ses partenaires et professionnels au Salon International du Tourisme d’Abidjan (SITA), dont la 6e édition se tiendra au mois d’avril prochain.

LM

top-resa-5Roger Kacou, ministre du Tourisme de la Côte d’Ivoire




Un Top Resa pas au top

Le salon IFTM-Top Resa qui vient de se tenir à Paris (19 au 21 septembre) confirme que l’hiver sera rude pour notre destination.

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L’attentisme des tour-operators français par rapport à la destination Tunisie se voyait sur le stand tunisien, où ils brillaient par leur absence. L’attentisme se lit aussi dans les chiffres puisque, selon l’ONTT Paris, aucun siège charter n’a été programmé pour l’hiver 2016-2017, contre 13 212 sièges l’hiver dernier. On comptera donc sur les vols réguliers et les options de blocs-sièges pris par les TO qui sont en légère hausse, passant de 563 337 sièges l’hiver dernier à 567 280 sièges cet hiver.

La traduction de ces chiffres, dans l’esprit de certains professionnels tunisiens présents, est la nécessité pour la destination de s’engager sur le “package dynamique”. C’est ainsi que plusieurs projets d’OTA ou de centrale de réservation sont actuellement en discussion pour un lancement prochain.

 

Tunisair : bonnet d’âne

Du côté de Tunisair, on a choisi de continuer à entretenir le flou en diffusant sur le salon une plaquette dans laquelle on peut lire : « Le charter représente un quart de notre activité aérienne, nous desservons plusieurs villes Tunisienne [sic] et Française [re-sic] ». Au-delà des fautes d’orthographe (quatre en une seule phrase), cette annonce est en contradiction flagrante avec la stratégie annoncée et avec les chiffres de Tunisair et du marché ; à moins que notre compagnie ne confonde désormais charter et blocs-sièges sur vol régulier.




Pour un retour des chaînes espagnoles

La ministre du Tourisme et de l’Artisanat, Mme Selma Elloumi, à la tête d’une délégation dont des professionnels, vient d’effectuer une tournée auprès des dirigeants des grandes chaînes hôtelières espagnoles. Des chaînes implantées depuis longtemps en Tunisie, mais dont le développement ou la présence dans le pays a connu un coup d’arrêt ces dernières années.

En effet, hormis Melia Hoteles, dont le départ remonte à 2006, et Vincci Hoteles, qui vient de confirmer son maintien en Tunisie par la signature de deux contrats de gestion pour compte, les chaînes Riu et Iberostar avaient opté jusque-là pour un attentisme passif consistant à ne pas renouveler les contrats arrivés à terme. Cette visite de Mme Elloumi aurait servi à dissiper certains malentendus sur la situation réelle de la destination, et à montrer l’intérêt que continue à porter la Tunisie à sa coopération avec les entreprises espagnoles.

La visite a été aussi l’occasion pour Mme Elloumi de s’entretenir avec son homologue espagnol, le secrétaire générale de l’OMT, ainsi qu’avec la presse ibérique.

Photo en haut : Selma Elloumi avec Carlos Calero, CEO et DG de Vincci Hoteles

 

Avec le staff Sol Melia (Gabriel Escarer et Maria Zarratuqui)

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Avec le staff d’Ibersostar (à la droite de la Ministre, Aurelio Vazquez Villa, CEO)

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Avec Carmen Riu (chaîne Riu)

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Avec le staff de Vincci Hoteles

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Avec le staff de l’OMT

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La grève évitée, et après ?

La signature d’un accord a permis d’éviter la grève générale. Mais les hôteliers ne sont pas pour autant  “sortis de l’auberge”, et la saison 2017 s’annonce bien compliquée.

 

La FTH et l’UGTT ont finalement su faire parler la raison et se sont entendus (photo) pour que les augmentations de salaires ne concernent pas 2015, mais 2016. Des augmentations payables à partir du mois courant, avec un échelonnement sur 2017 des montants dus pour les 8 premiers mois de l’année, selon les moyens des sociétés hôtelières.

La catastrophe d’une grève générale (lire notre article) est évitée, mais les hôtels ne sont pas pour ainsi dire “sortis de l’auberge”, car l’année 2017 s’annonce des plus difficiles. En effet, malgré l’amélioration sécuritaire, la Tunisie semble impuissante devant les problèmes de la saleté et de l’incivilité des Tunisiens (lire sur lepoint.fr « Tunisie : quand les routes s’apparentent à un ring »). La fusion des ministères des Affaires locales et de l’Environnement ne semble, pour l’instant, déboucher que sur des palabres. Le report sine die des élections municipales entretient le doute sur notre volonté de quitter le terrain de la politique politicienne pour celui de la résolution effective des problèmes du pays.

La déclaration récente de l’ambassadeur d’Allemagne, conditionnant l’arrivée de touristes allemand à la propreté du pays, la défection des TO français pour l’hiver 2017 et le risque de rechute du marché russe sont parmi les nuages noirs qui s’amoncellent dans le ciel déjà gris du tourisme tunisien.

Open Sky ou pas, notre destination est acculée à proposer à ses partenaires autre chose que des discours ; un avis que semble partager le président de la FTH, Radhouane Ben Salah, puisqu’il annonce « des décisions concrètes dans les prochaines semaines ». Espérons.

LM

 La Tunisie semble impuissante devant les problèmes de la saleté et de l’incivilité des Tunisiens…ordures




Grève générale, un malentendu généralisé

La grève générale dans l’hôtellerie annoncée par l’UGTT pour les 17 et 18 septembre aura bien lieu, faute d’entente entre la FTH et la centrale syndicale sur une augmentation des salaires portant sur l’année 2015. C’est ce qu’a annoncé aujourd’hui la FTH lors d’une conférence de presse tenue à Tunis.

Une grève devenue donc inéluctable au vu des interprétations contraires que font les deux protagonistes de la situation de l’hôtellerie tunisienne. Alors que les hôteliers soulignent l’effondrement de leurs résultats, l’UGTT semble donner crédit aux déclarations optimistes générées par l’embellie de l’été 2016 ; une embellie très relative après une année catastrophique.

En effet, l’année 2015 a enregistré une baisse de la capacité mise en exploitation de 8599 lits par rapport à 2014, avec 168 930 lits. Ceux-ci sont restés en moyenne aux ¾ vides : le taux d’occupation annuel n’a été que de 26,1%, contre 44,9% en 2014. Cette descente aux enfers est due à une chute des nuitées de 54,9% pour les non résidents, soit 11,1 millions de nuitées contre 24,7 millions en 2014. Une véritable catastrophe économique, somme toute compréhensible après les deux attentats du Bardo et de Sousse, mais dont tous les intervenants du secteur ne semblent pas encore convaincus.

Au cours de cette conférence et comme un écho au pessimisme des membres de la FTH concernant les mois à venir, l’Echo Touristique annonçait à 12h20 l’abandon de la destination Tunisie par les grands TO français pour les clubs de vacances, avec cette phrase sibylline : « Les autorités tunisiennes continuent de tenir un discours optimiste, mais les voyagistes français placent leur saison hiver sous le signe de la prudence, et optent pour la raison quand ils avaient souvent fait le choix du cœur ces dernières années ». A méditer.

LM

 

Photo : les membres de la FTH lors de la conférence de presse du 14/09/2016