René Trabelsi : le pays a besoin de devises

Lors d’une rencontre à Nabeul organisée par l’Institut des Politiques Publiques du parti Machrou3 Tounes, il y a eu convergence de points de vue entre l’actuel Ministre René Trabelsi et l’ancien, Slim Tlatli. Le premier pour dire que notre tourisme « a besoin de devises et donc des marchés internationaux qui en sont pourvoyeurs », et le second pour insister sur le fait qu’ « il faut arrêter la course vers la seule augmentation du chiffre des entrées touristiques ». Décryptage.

 

Le paradoxe du tourisme tunisien peut se lire au niveau des chiffres des 4 premiers mois de l’année en cours, en comparaison avec ceux de la même période de 2010.

Année exceptionnelle en terme de croissance des entrées (+25,5% au 30 avril), 2019 ne pallie pas pour autant (pas encore…) les fragilités apparues depuis 2011, à savoir une augmentation des entrées ne s’accompagnant pas d’une progression des nuitées et des recettes.

En effet, pour les 4 premiers mois de cette année, on enregistre une baisse des nuitées (–27,1% au 30 avril par rapport à la même période de 2010). Idem pour les recettes en devises étrangères (–19% en euros et –33% en dollars US) ; une baisse dont la dévaluation du dinar n’est pas la seule explication.

La raison en est que depuis 2011, le tourisme tunisien a vu se transformer sa structure de clientèle en faveur des marchés maghrébins dont la durée de séjour est en moyenne moindre que celle des autres marchés (1,13 jours contre 6,8 pour les marchés européens en 2017) et le mode d’hébergement souvent non hôtelier.

Ainsi, restant moins dans le pays, les Maghrébins dépensent moins. La question pour les décideurs tunisiens est de rétablir l’ancien équilibre entrées/recettes/nuitées en incitant les Maghrébins à opter pour de plus longs séjours, et en augmentant le nombre d’entrées européennes.

Pour tous les marchés, le tourisme tunisien doit se montrer plus inventif en montrant toutes les possibilités de visites et d’expériences à vivre dans le pays.

Et montrer aux Algériens qu’il est plus intéressant pour eux d’opter pour un forfait dans un hôtel tunisien que de passer par le locatif. C’est ce qu’a démontré il y a quelques mois un éditorialiste algérien dans une vidéo sur Facebook.

A nos hôtels et agences de voyages de porter cette bonne parole aux oreilles des Algériens…

Lotfi Mansour

 

 

 

 




Statistiques : la destination va mieux, les hôtels pas encore

Plus d’arrivées qu’en 2010 mais moins de nuitées : le tourisme tunisien va mieux, mais il est toujours convalescent.

 

Des statistiques à la fin du mois d’août, on retiendra la bonne croissance des arrivées des non résidents : elles enregistrent une hausse de 19,4% par rapport à la même période de 2017, et même de 7% par rapport à 2010. Une croissance soutenue essentiellement par le retour des marchés européens, en hausse de 48,6% par rapport à 2017.

Cette hausse des Européens reste, cependant, insuffisante puisque les entrées européennes sont encore en recul aussi bien par rapport à 2014 qu’à 2010 (respectivement – 16,6% et – 36,9%). Ceci explique sans doute le retard non encore comblé dans les nuitées (– 32,9% au 30 juin ; les chiffres ultérieurs ne sont pas encore publiés) et la circonspection des hôteliers.

En effet, le poids des Européens dans les nuitées, et donc dans les recettes des hôtels et de la destination, reste prépondérant (voir tableau ci-dessous) malgré sa baisse depuis 2011. Ainsi, avec seulement 24% des arrivées, les Européens représentaient en 2017 plus de 52% des nuitées (contre 82% en 2010) et près de 60% des recettes touristiques du pays (contre 81% en 2010).

Il faut néanmoins se réjouir de la tendance amorcée cette année d’un rééquilibrage du poids de nos principaux marchés (européen, maghrébin et local) et du retour progressif des produits à haute valeur ajoutée (MICE, thalasso…).

Lotfi Mansour

tableau europe-maghreb