Affaire Thomas Cook : quand les journaleux dérapent

« Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose » : telle semble être la devise de certains journaleux tunisiens qui jouent aux journalistes d’investigation en retranscrivant (mal ?)  les propos d’un souffleur sans aucun recoupement de l’information.

Il en est ainsi du dernier « papier » (on n’ose pas dire article) publié dans un quotidien sur les supposés torts de la FTH et de son président, Khaled Fakhfakh, dans la gestion de l’affaire Thomas Cook.

A l’apprenti-journaliste et à son souffleur, nous tenons à rappeler quelques vérités sur cette affaire et sur le fonctionnement du secteur du tourisme.

La FTH, pas plus que le Ministère du Tourisme, n’a jamais été et ne pourrait être d’aucune manière partie prenante dans un contrat d’allotement liant un tour-operator à un hôtelier.
Seul l’hôtelier est responsable (puisqu’il est le seul signataire) des conditions de vente, des prix et des délais de paiement consentis au tour-operator. Que certains parmi les hôteliers veuillent aujourd’hui plaider « responsable mais pas coupable » en cherchant un bouc émissaire ne démontre que leur sens très relatif de la responsabilité.

La FTH ne peut entamer des procédures contre Thomas Cook que sur délégation de ses membres hôteliers lésés dans cette affaire. Et c’est ce qu’elle a fait.

Le jugement de 8 mois de prison contre le président de la FTH pour un communiqué de presse n’a pu se faire pour diffamation mais pour nuisance à un tiers et perturbation de sa quiétude « à travers les réseaux publics de télécommunications ».
En effet, ce communiqué ne citait nommément aucune personne ni société (lire notre article).
Si un tel délit était prouvé, pourquoi n’a-t-on pas condamné tous les membres du Conseil National de la FTH, puisqu’ils sont censés avoir approuvé le communiqué ? D’autant plus que M. Fakhfakh lui-même n’a pas signé cet objet du délit.

Rappelons aussi que l’avion objet de la saisine de « l’homme d’affaires éminent » (comme le désigne notre journaleux) n’appartenait pas à Condor, la filiale de Thomas Cook, puisqu’il était en leasing.
De surcroît, il ne pouvait faire l’objet d’une « saisine conservatoire » puisqu’il arrivait en Tunisie dans le cadre d’une rotation commerciale.

Enfin, la FTH est une des plus vieilles institutions du secteur et a vu passer à sa tête des personnes qui ont fait le tourisme tunisien. A ce titre, elle fait partie de la mémoire du secteur et ne doit pas être mêlée ni de près ni de loin aux querelles de personnes.

Lotfi Mansour




Khaled Fakhfakh condamné à la prison ferme

Suite au communiqué publié par la FTH en octobre 2019 (voir ci-dessous), son président Khaled Fakhfakh (qui n’avait pas signé le dit communiqué) vient de se voir condamner en première instance à 8 mois de prison en vertu de la loi 86 du Code des Télécommunications. Cet article stipule : « Est puni d’un emprisonnement de un (1) an à deux (2) ans et d’une amende de cent (100) à mille (1000) dinars quiconque sciemment nuit aux tiers ou perturbe leur quiétude à travers les réseaux publics de télécommunications ».

En attendant les suites que la justice donnerait en appel à cette affaire, nous ne nous permettons aucun commentaire sinon qu’il n’y a pas de bonne ou de mauvaise loi, tout dépend de l’esprit avec lequel elle est appliquée.

 

Communiqué de la FTH, octobre 2019

La FTH a appris avec la plus grande consternation la tentative d’immobilisation illégale d’un avion de la compagnie Condor sur l’aéroport de Djerba, ainsi que la décision de cette compagnie de cesser toute activité sur la Tunisie, et toutes les répercussions négatives sur les touristes, sur l’image de la destination, sur le secteur touristique ainsi que sur l’économie nationale.

La FTH condamne avec la plus grande fermeté les agissements individuels et isolés de certains hôteliers qui compromettent la reconstruction d’une confiance indispensable envers nos partenaires étrangers. Les faillites et impayés sont intrinsèques aux risques du métier et nous insistons fortement auprès de nos confrères hôteliers pour qu’ils évitent tout comportement irréfléchi.
La FTH a entrepris une action collective afin de faire valoir les droits des hôteliers touchés par la faillite de Thomas Cook et rappelle qu’un travail collectif et uni est bien plus efficace que des actes isolés.
Par ailleurs, la FTH demande la révision du cahier des charges et lois régissant l’activité des opérateurs touristiques afin d’améliorer les garanties financières nécessaires à ces activités et assurer une plus grande sérénité aux opérateurs nationaux.
La FTH souhaite le meilleur à la Tunisie en cette période électorale et demeure convaincue que le tourisme est l’un des piliers incontournables sur laquelle se basera le développement de notre économie dans les années à venir.




FTH : Fédération Tunisienne de l’Hilarité ?

L’information est passée presque inaperçue : une photo et une légende dans la page Facebook de la Présidence du Gouvernement pour dire que le Chef du Gouvernement a reçu mardi dernier une délégation de la FTH conduite par son président Khaled Fakhfakh. Mais sur la photo, point de Fakhfakh ni de Ministre du Tourisme (bizarrement absente de cette réunion).

Un communiqué de la FTH aurait pu éclairer notre lanterne sur le contenu de cette réunion, mais point de communiqué à ce jour, ni de post sur les réseaux sociaux. Circulez, il n’y a rien à voir !

Il ne nous reste plus qu’à jouer aux devinettes face à une photo mettant en avant des personnes dont le large sourire confine à l’hilarité. Mais de quoi rigole-t-on ? Ou faut-il se demander : de qui se moque-t-on ?

Lotfi Mansour




Khaled Fakhfakh : «La FTH sera une force de proposition»

Tout en changeant de style et de méthode de travail, le nouveau président de la FTH s’inscrit dans la continuité de son prédécesseur en prônant un partenariat renforcé avec l’administration. Entretien.

 

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Où en est le nouveau bureau de la FTH à propos de la restructuration de la fédération et des propositions de relance du tourisme tunisien ?

Khaled Fakhfakh
Nous nous apprêtons à publier un “Livre blanc” sur l’endettement ainsi qu’un “Livre bleu”, que nous adresserons au Chef du gouvernement, sur les problèmes du secteur et les solutions que nous préconisons. Par ailleurs, nous avons convenu avec le ministère du Tourisme de la présence de membres de notre bureau aux réunions portant sur les réformes du secteur. Ainsi, la FTH est présente à travers l’ensemble des membres de son bureau et non plus seulement à travers son président.

Mais au-delà, la restructuration de la FTH est-elle toujours d’actualité ?

Nous allons reprendre l’étude de restructuration faite il y a quelques années pour l’actualiser et la mettre en œuvre. D’ores et déjà, nous avons décidé de donner plus d’autonomie, y compris sur le plan financier, aux fédérations régionales qui sont plus à même de répondre aux spécificités de leurs régions.

Au niveau national, le changement touchera les statuts ainsi que l’organisation du syndicat. La FTH doit devenir plus démocratique et doit pouvoir, à terme, fonctionner sans les membres élus grâce à la création du poste de Directeur Général qui s’occupera du volet administratif et de la gestion courante de la fédération. La gestion de la FTH ne doit plus dépendre de l’humeur ou du profil du président.

A écouter certaines de vos déclarations aux médias, on dirait que l’autorisation de l’immobilier touristique est séparée du problème de l’endettement hôtelier ; alors qu’elle en est une solution, du moins en partie…

En effet, l’idée de l’immobilier touristique était de permettre une mise à niveau des hôtels et d’absorber une partie de l’endettement. Cette idée est à applaudir, puisqu’elle ne coûte rien au contribuable tout en permettant des recettes pour l’Etat. Mais aujourd’hui, on est en train de dévier de cet esprit en multipliant les contraintes et en manquant de précision puisque les textes d’application ne sont pas publiés.

La plus-value à verser à l’AFT, pour payer d’éventuels aménagements qu’elle serait amener à faire, semble vous poser problème…

Oui, puisque le rôle de l’AFT s’est arrêté le jour où elle a vendu le terrain à l’hôtelier. L’aménagement résultant de cette opération est celui des parkings à agrandir, qui incombera à l’hôtelier. Le principe même de se faire payer une deuxième fois un terrain qui n’appartient plus à l’AFT pose problème ; le “business model” de l’AFT est certainement à revoir…

A propos de “business model”, que pensez-vous de la restructuration de l’ONTT en trois agences, dans les conseils desquelles vous auriez la même représentativité que celle que vous avez à l’ONTT, c’est-à dire un siège sur treize ?

Ce qui m’intéresse, c’est de savoir si les membres du gouvernement considèrent le tourisme comme un secteur important pour l’avenir du pays. Il est vrai que nous avons une administration omniprésente et que, en plus de notre interlocuteur de référence qu’est le ministère du Tourisme, nous devons, pour certains problèmes, nous adresser à une multitude de ministères, ce qui complique et alourdit nos démarches. C’est dans ce sens qu’il est important de faire du ministère du Tourisme un ministère de souveraineté, ou bien de le rattacher au Chef du gouvernement.

Dans l’état actuel des choses, on a besoin d’un ministère fort et peu importe qu’il soit organisé en trois agences ou pas… Ce que nous voulons, c’est un Etat qui joue son rôle et qui ait le sens des priorités. Je pose la question : qu’est-ce qui est prioritaire, le secteur du Tourisme et de l’Artisanat qui pèse 800 000 employés, ou bien Tunisair, El Fouladh et Transtu qui ne comptent que quelques dizaines de milliers d’employés et qui sont de véritables gouffres financiers ?

Ce n’est pas parce que le l’hôtellerie tunisienne est constituée d’entreprises privées qu’elle ne doit pas bénéficier d’un soutien, et ce n’est pas à cause du mauvais comportement d’une poignée d’hôteliers qu’on peut laisser couvrir d’opprobre une industrie entière.

Vous semblez accorder une grande importance au rôle de l’Etat dans la relance du secteur. Quel serait alors votre rôle en tant qu’hôteliers et FTH ?

Nous devons devenir une force de proposition et établir un partenariat constructif ; nous n’avons pas d’adversaires. Nous n’entrerons ni dans la politique, ni dans la polémique, ni dans la confrontation. Nous comptons sur notre pouvoir de persuasion et d’explication pour faire avancer le secteur.

Concrètement, que demanderez-vous à l’Etat ? Prenons l’exemple de la loi sur les avantages fiscaux qui vient d’être votée, quel commentaire en faites-vous ?

Cette loi exclut des avantages fiscaux le tourisme et même une partie de l’industrie ; c’est une erreur. D’une manière générale, et pour une entreprise qui dégage des bénéfices, l’incitation fiscale est destinée à favoriser l’investissement au détriment de la distribution de dividendes. Tout Etat doit donc se féliciter que des entreprises arrivent au stade de la recherche de dégrèvement fiscal, puisque cela signifie qu’elles dégagent des bénéfices et qu’elles pensent à investir. L’hôtellerie est aujourd’hui en crise et la plupart des hôtels ne dégagent pas de bénéfices ; une incitation fiscale devrait donc les accompagner pour maintenir l’appareil de production et assainir leurs finances. En excluant le tourisme de cette loi, je crains qu’on n’ait réduit l’espoir de maintien et de redressement de beaucoup d’unités hôtelières.

Toujours dans le domaine fiscal, quelle est votre attitude concernant la taxe sur le chiffre d’affaires destinée au FODEC ? Et que pensez-vous de la gestion actuelle du FODEC lui-même ?

Nous avons pour ce fonds deux objectifs. Le premier, qui est accessoire et sur lequel le ministère du Tourisme nous donne satisfaction, est la rétrocession d’une partie de la taxe pour la fédération. Le second objectif, qui est essentiel, est de savoir si le FODEC est bien géré. Nous constatons que c’est le cas avec Mme Elloumi puisque le FODEC est utilisé pour promouvoir des régions qui en ont besoin (le Sud, Tabarka…). Concernant la participation de la FTH au FODEC, nous ne pouvons qu’applaudir l’attitude, positive et constructive, de la Ministre du Tourisme vis-à-vis des hôteliers.

Propos recueillis par L. Mansour

(Mis à jour le 01/03 à 20h12)