Khaled Fakhfakh : «La FTH sera une force de proposition»

Tout en changeant de style et de méthode de travail, le nouveau président de la FTH s’inscrit dans la continuité de son prédécesseur en prônant un partenariat renforcé avec l’administration. Entretien.

 

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Où en est le nouveau bureau de la FTH à propos de la restructuration de la fédération et des propositions de relance du tourisme tunisien ?

Khaled Fakhfakh
Nous nous apprêtons à publier un “Livre blanc” sur l’endettement ainsi qu’un “Livre bleu”, que nous adresserons au Chef du gouvernement, sur les problèmes du secteur et les solutions que nous préconisons. Par ailleurs, nous avons convenu avec le ministère du Tourisme de la présence de membres de notre bureau aux réunions portant sur les réformes du secteur. Ainsi, la FTH est présente à travers l’ensemble des membres de son bureau et non plus seulement à travers son président.

Mais au-delà, la restructuration de la FTH est-elle toujours d’actualité ?

Nous allons reprendre l’étude de restructuration faite il y a quelques années pour l’actualiser et la mettre en œuvre. D’ores et déjà, nous avons décidé de donner plus d’autonomie, y compris sur le plan financier, aux fédérations régionales qui sont plus à même de répondre aux spécificités de leurs régions.

Au niveau national, le changement touchera les statuts ainsi que l’organisation du syndicat. La FTH doit devenir plus démocratique et doit pouvoir, à terme, fonctionner sans les membres élus grâce à la création du poste de Directeur Général qui s’occupera du volet administratif et de la gestion courante de la fédération. La gestion de la FTH ne doit plus dépendre de l’humeur ou du profil du président.

A écouter certaines de vos déclarations aux médias, on dirait que l’autorisation de l’immobilier touristique est séparée du problème de l’endettement hôtelier ; alors qu’elle en est une solution, du moins en partie…

En effet, l’idée de l’immobilier touristique était de permettre une mise à niveau des hôtels et d’absorber une partie de l’endettement. Cette idée est à applaudir, puisqu’elle ne coûte rien au contribuable tout en permettant des recettes pour l’Etat. Mais aujourd’hui, on est en train de dévier de cet esprit en multipliant les contraintes et en manquant de précision puisque les textes d’application ne sont pas publiés.

La plus-value à verser à l’AFT, pour payer d’éventuels aménagements qu’elle serait amener à faire, semble vous poser problème…

Oui, puisque le rôle de l’AFT s’est arrêté le jour où elle a vendu le terrain à l’hôtelier. L’aménagement résultant de cette opération est celui des parkings à agrandir, qui incombera à l’hôtelier. Le principe même de se faire payer une deuxième fois un terrain qui n’appartient plus à l’AFT pose problème ; le “business model” de l’AFT est certainement à revoir…

A propos de “business model”, que pensez-vous de la restructuration de l’ONTT en trois agences, dans les conseils desquelles vous auriez la même représentativité que celle que vous avez à l’ONTT, c’est-à dire un siège sur treize ?

Ce qui m’intéresse, c’est de savoir si les membres du gouvernement considèrent le tourisme comme un secteur important pour l’avenir du pays. Il est vrai que nous avons une administration omniprésente et que, en plus de notre interlocuteur de référence qu’est le ministère du Tourisme, nous devons, pour certains problèmes, nous adresser à une multitude de ministères, ce qui complique et alourdit nos démarches. C’est dans ce sens qu’il est important de faire du ministère du Tourisme un ministère de souveraineté, ou bien de le rattacher au Chef du gouvernement.

Dans l’état actuel des choses, on a besoin d’un ministère fort et peu importe qu’il soit organisé en trois agences ou pas… Ce que nous voulons, c’est un Etat qui joue son rôle et qui ait le sens des priorités. Je pose la question : qu’est-ce qui est prioritaire, le secteur du Tourisme et de l’Artisanat qui pèse 800 000 employés, ou bien Tunisair, El Fouladh et Transtu qui ne comptent que quelques dizaines de milliers d’employés et qui sont de véritables gouffres financiers ?

Ce n’est pas parce que le l’hôtellerie tunisienne est constituée d’entreprises privées qu’elle ne doit pas bénéficier d’un soutien, et ce n’est pas à cause du mauvais comportement d’une poignée d’hôteliers qu’on peut laisser couvrir d’opprobre une industrie entière.

Vous semblez accorder une grande importance au rôle de l’Etat dans la relance du secteur. Quel serait alors votre rôle en tant qu’hôteliers et FTH ?

Nous devons devenir une force de proposition et établir un partenariat constructif ; nous n’avons pas d’adversaires. Nous n’entrerons ni dans la politique, ni dans la polémique, ni dans la confrontation. Nous comptons sur notre pouvoir de persuasion et d’explication pour faire avancer le secteur.

Concrètement, que demanderez-vous à l’Etat ? Prenons l’exemple de la loi sur les avantages fiscaux qui vient d’être votée, quel commentaire en faites-vous ?

Cette loi exclut des avantages fiscaux le tourisme et même une partie de l’industrie ; c’est une erreur. D’une manière générale, et pour une entreprise qui dégage des bénéfices, l’incitation fiscale est destinée à favoriser l’investissement au détriment de la distribution de dividendes. Tout Etat doit donc se féliciter que des entreprises arrivent au stade de la recherche de dégrèvement fiscal, puisque cela signifie qu’elles dégagent des bénéfices et qu’elles pensent à investir. L’hôtellerie est aujourd’hui en crise et la plupart des hôtels ne dégagent pas de bénéfices ; une incitation fiscale devrait donc les accompagner pour maintenir l’appareil de production et assainir leurs finances. En excluant le tourisme de cette loi, je crains qu’on n’ait réduit l’espoir de maintien et de redressement de beaucoup d’unités hôtelières.

Toujours dans le domaine fiscal, quelle est votre attitude concernant la taxe sur le chiffre d’affaires destinée au FODEC ? Et que pensez-vous de la gestion actuelle du FODEC lui-même ?

Nous avons pour ce fonds deux objectifs. Le premier, qui est accessoire et sur lequel le ministère du Tourisme nous donne satisfaction, est la rétrocession d’une partie de la taxe pour la fédération. Le second objectif, qui est essentiel, est de savoir si le FODEC est bien géré. Nous constatons que c’est le cas avec Mme Elloumi puisque le FODEC est utilisé pour promouvoir des régions qui en ont besoin (le Sud, Tabarka…). Concernant la participation de la FTH au FODEC, nous ne pouvons qu’applaudir l’attitude, positive et constructive, de la Ministre du Tourisme vis-à-vis des hôteliers.

Propos recueillis par L. Mansour

(Mis à jour le 01/03 à 20h12)




Immobilier touristique : une circulaire et des malentendus

Le PDG de l’AFT, Khaled Trabelsi, nous a apporté ses éclaircissements sur le projet de circulaire qui devrait autoriser la création de projets immobiliers sur les terrains hôteliers.

 

Concocté par les ministères du Tourisme et de l’Equipement afin de favoriser un allégement du poids de la dette des hôtels – et une relance de l’économie en général à travers des projets immobiliers –, le projet de circulaire autorisant une composante immobilière sur les terrains hôteliers a, étonnement, soulevé plus de réserves que d’enthousiasme de la part des hôteliers.

Contact pris avec Khaled Trabelsi, PDG de l’AFT (Agence foncière touristique), il s’avère que les appréhensions des hôteliers sont essentiellement dues à un manque d’information. En effet, le projet en question autorisera le volet immobilier sur « 30% du CUS » (coefficient d’utilisation du sol, identique pour toutes les régions) et non du COS (coefficient d’occupation du sol, qui varie selon les régions en spécifiant le nombre d’étages autorisés) comme certains ont cru le comprendre. Le modèle suivi, dans ce cas, est celui adopté pour les terrains de golf (comme à Gammarth) avec la création d’un lotissement immobilier séparé du lot hôtelier, explique Kh. Trabelsi.

Par ailleurs, la polémique portait sur la plus-value que demanderait l’AFT aux hôteliers dans le cadre d’un tel projet, c’est-à-dire le prix supplémentaire que les hôteliers devraient payer pour être autorisés à ériger un projet immobilier. Là aussi, le PDG de l’AFT précise qu’il s’agit pour son agence de faire payer le seul coût d’aménagement de la zone touristique qu’engendreront les nouveaux projets immobiliers. Il précise qu’ « il ne s’agit nullement pour nous d’une opération commerciale ; le montant à payer sera évalué au vu et au su de tout le monde et devrait couvrir les seuls coûts d’aménagement occasionnés par les nouvelles constructions ».

50% pour les non résidents

Reste l’exigence, figurant dans ce projet de circulaire, de la vente de 50% (et non pas 80% comme certains ont pu le croire) des unités immobilières à des clients « étrangers ». Les hôteliers préféreraient changer cela en « clients non résidents ». Le PDG de l’AFT nous a confirmé qu’il se ralliait au point de vue des professionnels, à partir du moment où l’objectif de la circulaire d’obtenir des ventes en devises étrangères était respecté.

Khaled Trabelsi a par ailleurs tenu à préciser que cette circulaire concerne l’ensemble des terrains hôteliers, sans considération d’un quelconque niveau d’endettement des hôteliers. En ce sens, il précise que l’AFT « ne s’immiscera pas dans les relations entre les hôteliers et leurs banques, même si l’un des objectifs de la circulaire est d’alléger le fardeau de la dette des hôtels endettés ».

On l’aura donc compris, cette circulaire ne sera pas « la panacée » pour la crise que vivent les hôteliers. Mais elle leur offre une nouvelle base de négociation avec les banques. Le succès commercial de cette mesure reste évidemment tributaire de l’attractivité de la destination et de la réactivité de nos banques pour faciliter l’acquisition de biens immobiliers aux non résidents.

LM