Parce que Kasserine le vaut bien !

A priori, on ne s’attend pas à ce que la région de Kasserine fasse l’objet d’une visite d’autant de décideurs du tourisme et de la presse touristique. Et pourtant…

 

C’est à l’initiative de la toute jeune Chambre Nationale de Transport Touristique présidée par Slim Ben Jaballah qu’un voyage d’agents de voyages et de journalistes a été organisé, samedi et dimanche derniers, pour couvrir le déplacement de deux ministres – celui du Tourisme et de l’Artisanat, Habib Ammar, et celle de l’Agriculture, Akissa Bahri – ainsi que de responsables de différentes agences et structures en rapport avec le secteur (AFT, Office du Thermalisme, ONTT, ONA…).

Au programme : ouverture de la saison de chasse, inauguration du nouvel hôtel Byzacène jouxtant le site archéologique de Sbeïtla (site dont on s’étonne qu’il ne figure pas encore sur la liste officielle de l’UNESCO), présentation du projet de la nouvelle station touristique de Sbeïtla, visite du Centre thermal de Boulaaba et de son futur gîte rural, et enfin présentation d’un projet de Village thermal dans la région.

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Le site de Sbeïtla en vidéo.

Passage obligé d’un bon nombre de touristes algériens via la GP 13, la région de Kasserine peut, avec ces projets, aspirer à les retenir un peu. Elle peut surtout espérer répondre aux besoins de ses propres habitants en loisirs et tourisme, et pourquoi pas, devenir aussi une destination pour l’ensemble des Tunisiens.

Sbeïtla : une station touristique pour le tourisme local et régional

Il en est ainsi de la nouvelle station touristique en cours de réalisation par l’AFT à Sbeïtla, en face de l’hôtel Byzacène, sur la route GP13 et s’étendant sur 32 ha. Elle ressemblera plus à un parc urbain complété par un centre commercial et deux unités hôtelières.

Comme tient à le souligner Khaled Trabelsi, pdg de l’AFT, ce projet répondra d’abord aux besoins des locaux en espaces de promenade et de loisirs, et à ceux des Algériens et des autres touristes internationaux en leur offrant une halte de repos et de shopping.

Présentation du projet par le pdg de l’AFT

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Quand thermalisme rime avec tourisme

Le grand potentiel de la région en eau thermale chaude lui vaut déjà une fréquentation assidue des locaux, des Algériens et des Libyens. Il en est ainsi de la station thermale de Boulaaba qui a totalisé en 2019 quelque 34000 curistes, dont 44% d’Algériens. Faute de logements sur place, la fréquentation se fait actuellement “en ambulatoire”. C’est pour y remédier que la station, qui dispose déjà d’un centre équestre de purs-sangs arabes, se transformera bientôt en gîte rural avec bungalows, restaurant et café.

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Cependant, l’objectif de l’Etat est d’aller encore plus loin en développant un Village thermal jouxtant le village de Boulaaba. Ce projet, qui s’étendra sur 48ha dont un tiers d’espaces verts, nécessitera pour son aménagement un investissement de 15 millions de dinars pour une capacité d’accueil de 200 000 clients annuels. Il comportera aussi des habitations pour une capacité de 1500 habitants.

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Kasserine, une destination pour les Tunisiens ?

A l’issue de ce voyage, il est vrai qu’on rentre un peu fatigué par la longueur du trajet, mais on est surtout lesté de quelques préjugés sur une région qui n’est pas moins verte, ni moins agréable que le reste du pays. Personnellement, mon seul regret est de n’avoir pas pu embarquer une de ces belles citrouilles qui jonchaient par centaines le bas-côté des routes et dont la région est grande productrice, au même titre que l’huile d’olive, les pommes grosses comme deux balles de tennis, les figues de barbarie (dont on fabrique une savoureuse confiture) et les pistaches.

Mais tout Tunisien de passage à Kasserine se doit de visiter le Centre Culturel des Arts et Métiers de Semmama. Erigé comme un défi aux égarés de Djebel Semmama, ce lieu est une véritable vitrine du dynamisme des habitants de la région, de la vitalité de son artisanat et de la richesse de ses produits du terroir. Y aller et y acheter des produits d’artisanat (confitures, extraits divers de fleurs et de plantes, nattes, vannerie…), c’est faire un pied de nez aux terroristes.

Lotfi Mansour

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Immobilier touristique : une circulaire et des malentendus

Le PDG de l’AFT, Khaled Trabelsi, nous a apporté ses éclaircissements sur le projet de circulaire qui devrait autoriser la création de projets immobiliers sur les terrains hôteliers.

 

Concocté par les ministères du Tourisme et de l’Equipement afin de favoriser un allégement du poids de la dette des hôtels – et une relance de l’économie en général à travers des projets immobiliers –, le projet de circulaire autorisant une composante immobilière sur les terrains hôteliers a, étonnement, soulevé plus de réserves que d’enthousiasme de la part des hôteliers.

Contact pris avec Khaled Trabelsi, PDG de l’AFT (Agence foncière touristique), il s’avère que les appréhensions des hôteliers sont essentiellement dues à un manque d’information. En effet, le projet en question autorisera le volet immobilier sur « 30% du CUS » (coefficient d’utilisation du sol, identique pour toutes les régions) et non du COS (coefficient d’occupation du sol, qui varie selon les régions en spécifiant le nombre d’étages autorisés) comme certains ont cru le comprendre. Le modèle suivi, dans ce cas, est celui adopté pour les terrains de golf (comme à Gammarth) avec la création d’un lotissement immobilier séparé du lot hôtelier, explique Kh. Trabelsi.

Par ailleurs, la polémique portait sur la plus-value que demanderait l’AFT aux hôteliers dans le cadre d’un tel projet, c’est-à-dire le prix supplémentaire que les hôteliers devraient payer pour être autorisés à ériger un projet immobilier. Là aussi, le PDG de l’AFT précise qu’il s’agit pour son agence de faire payer le seul coût d’aménagement de la zone touristique qu’engendreront les nouveaux projets immobiliers. Il précise qu’ « il ne s’agit nullement pour nous d’une opération commerciale ; le montant à payer sera évalué au vu et au su de tout le monde et devrait couvrir les seuls coûts d’aménagement occasionnés par les nouvelles constructions ».

50% pour les non résidents

Reste l’exigence, figurant dans ce projet de circulaire, de la vente de 50% (et non pas 80% comme certains ont pu le croire) des unités immobilières à des clients « étrangers ». Les hôteliers préféreraient changer cela en « clients non résidents ». Le PDG de l’AFT nous a confirmé qu’il se ralliait au point de vue des professionnels, à partir du moment où l’objectif de la circulaire d’obtenir des ventes en devises étrangères était respecté.

Khaled Trabelsi a par ailleurs tenu à préciser que cette circulaire concerne l’ensemble des terrains hôteliers, sans considération d’un quelconque niveau d’endettement des hôteliers. En ce sens, il précise que l’AFT « ne s’immiscera pas dans les relations entre les hôteliers et leurs banques, même si l’un des objectifs de la circulaire est d’alléger le fardeau de la dette des hôtels endettés ».

On l’aura donc compris, cette circulaire ne sera pas « la panacée » pour la crise que vivent les hôteliers. Mais elle leur offre une nouvelle base de négociation avec les banques. Le succès commercial de cette mesure reste évidemment tributaire de l’attractivité de la destination et de la réactivité de nos banques pour faciliter l’acquisition de biens immobiliers aux non résidents.

LM